Elle est belle ma Moselle
Quand elle est en colère,
Rugissante, enivrante, envoûtante,
Elle bouscule les ponts
Vomissant son amertume
En vagues écumantes
Se riant de ses berges
Oubliant leur candeur de l'été passé
ᵜᵜᵜᵜ
Elle se gonfle des pleurs de ma montagne
Toute à son avidité ,
Devenant vite hargneuse,
Elle s'étale et vocifère
Exagère et exaspère....
ᵜᵜᵜᵜ
De ses langues d'écume
Fouille les tréfonds de sa couche
Exhumant les cadavres de ses âmes noyées
Les laissant un court instant
Remonter à la surface
Y jetant des cris d'indignation
Sur leur volonté perdue,
A jamais par elle dévorée
ᵜᵜᵜᵜ
Les entraîne en roulis
Dans le creux de son ventre
Pour une grande cavale
Les roulant sur les galets
Les broyant comme fétu de paille
De leur vie de naguère
Ne reste plus que des os et des larmes
ᵜᵜᵜᵜ
Je vois passer là, tous les noyés de la terre
Accrochant leurs douloureux squelettes
Aux branches mortes des baliveaux
Se confondant en eux
Y déchirant toute leur misère
Arbres déracinés,
Cénotaphe du temps passé
ᵜᵜᵜᵜ
J'ai vu leurs yeux caverneux
Me regarder avec effroi
Leurs cranes de damnés
Se fracasser, hurlant dans le tumulte
ᵜᵜᵜᵜ
Reculer ! avec elle, plus rien à faire
Dans son flot rugissant
Si elle vous emporte
Vous aussi, deviendrai
Peine et tristesse de ce monde
ᵜᵜᵜᵜ
Quand tout sera fini
Quand nous aurons, de nos âmes
Échoués sur vos prairies
Sans plus, déjà, on nous damne
Vite oublié par vous, nous repartirons en pleurant
Attendant de la Moselle la prochaine colère
Celle qui vous fait frémir, en danger d'adultère
Car un jour vous aussi, serez les noyés de la terre....
ᵜᵜᵜᵜ
Ma Moselle est en colère,
M’entraînant dans son cauchemar
Vision d'un affligeant spectacle
Par elle mon coeur se damne
ᵜᵜᵜᵜ
Mais je sais que le printemps
La retrouvera bien trop sage
Quand de l'hiver elle et moi ,
Auront oublié les tourments
Elle chantera à nouveau l'amour
L'amour et le partage
De gués en galets
Se fera douce sous les pas des amants
Clémentine*
11 novembre 2012